L’angoisse
Les troubles anxieux font partie des troubles psychiques les plus fréquents. L’Assurance Maladie affirme que ces troubles touchent 15 à 20% de la population française à un moment de leur vie.
Mais quelle est la différence entre anxiété et troubles anxieux ? Solène Demery, psychologue clinicienne et partenaire de MyNeo, vous explique, avec son vécu et son œil d’experte, ce que ressentent concrètement les patients atteints de troubles anxieux.
Le terme angoisse ou anxiété est connu de tous. Et pour une grande majorité d’entre nous pour ne pas dire tout le monde, c’est une réaction connue et vécue. Certaines situations peuvent engendrer une anxiété comme des examens médicaux, des contrôles à l’école ou encore même la préparation d’un mariage par exemple.
Vous l’aurez compris, l’anxiété en elle-même n’est pas pathologique. Elle est l’appréhension d’une situation avant même qu’elle ne se déroule. C’est une peur par anticipation. Ce sont nos pensées, nos questionnements et nos inquiétudes qui peuvent la déclencher.
L’anxiété est une réaction naturelle du corps, elle a pour rôle de garder notre corps en alerte face au danger.
Néanmoins, chez certaines personnes l’angoisse peut devenir un réel handicap dans la vie de tous les jours. Et c’est là que l’on pourra parler de troubles psychologiques.
Il y a une grande différence entre le fait d’angoisser pour certaines situations et de subir ce sentiment de manière récurrente.
L’anxiété se manifeste sous trois gros pôles, trois syndromes (un syndrome est un ensemble de symptômes).
-Syndromes physiques
-Syndrome mentale
-Syndrome comportemental
Concernant les syndromes physiques, ces derniers peuvent inquiéter les personnes qui les subissent. Il est fréquent que les patients que je rencontre m’explique que dans un premier temps ils sont allés aux urgences ou chez leur médecin. Aussi la plupart ont fait un tas d’examens médicaux (bilan sanguin, électrocardiogramme, radiographie, etc).
Pourquoi ont-il fait ces démarches médicales ?
Car les différents symptômes physiques que l’on retrouve lorsque l’on souffre d’anxiété ou que l’on fait une crise d’angoisse peuvent être impressionnants et inquiétants.
Troubles de la sphère cardiaque
Les troubles de sphère cardiovasculaire :
Il peut y avoir une modification du rythme cardiaque : Comme par exemple une accélération du rythme cardiaque (tachycardie), des palpitations, une hypotension artérielle (sensation de malaise, perte de connaissance, pâleur)
Troubles respiratoires
Certaines personnes peuvent présenter une dyspnée (c’est une sensation désagréable lors de la respiration, sensation de manquer d’air, une gène respiratoire). Cela peut aussi se présenter sous forme d’une respiration précipitée (halètement). Enfin, on peut retrouver la sensation de suffoquer.
Troubles digestifs
On peut ressentir comme des sortes de spasmes ou encore des constrictions œsophagiennes et épigastriques (cela se présente sous forme de sensation de crampes ou encore de douleurs thoraciques). Certaines personnes présentent des nausées avec présence ou non de vomissements et/ou diarrhée. Lorsque l’on souffre d’anxiété, les douleurs abdominales sont très courantes.
Troubles urinaires
Certaines personnes peuvent avoir des difficultés urinaires. On retrouve chez certains le fait d’avoir besoin d’aller fréquemment aux toilettes tout en urinant en petite quantité ou encore des personnes ayant des mictions en grande quantité.
Troubles musculaires
Lors d’un moment d’anxiété, on peut avoir des signes musculaires tels que des tremblements, des contractures musculaires (douleur à un muscle, cette contracture se retrouve fréquemment dans le dos ou aux muscles cervicaux). Mais aussi des trémulations faciales (tremblements situés au niveau des muscles du visage) ou encore des frissons.
Les autres symptômes
En plus des symptômes énumérés précédemment, il y a d’autres symptômes physiques que l’on ne peut pas reliés directement à certaines parties du corps.
Certaines personnes souffrant d’anxiété présentent des troubles du sommeil. Il peut y avoir des difficultés à l’endormissement (insomnies inaugurales), des réveils en plein milieu de la nuit (dyssomnie). Depuis que j’exerce mon métier de psychologue clinicienne, j’ai pu observer que les angoisses chez mes patientes sont très fréquentes la nuit. Les difficultés d’endormissement sont très nombreuses. Cela peut s’expliquer par de nombreuses ruminations.
Vous l’aurez compris, lorsque l’on présente certains de ces symptômes, cela peut être inquiétant. On peut se questionner sur une possible maladie cardiaque, pulmonaire, rénale ou autre. Pour certains patients, c’est très compliqué d’entendre le diagnostic du médecin qui est : « Vous ne présentez aucunes anomalies, cela doit être psychologique. Je vous conseille de prendre rendez-vous avec un psychologue ou un psychiatre. ». A mon sens, si cela étonne tant les patients c’est parce que nous ne sommes pas assez informés des symptômes physiques que peut engendrer l’anxiété.
Syndrome mental
Concernant le syndrome mental, on y retrouve cette inquiétude qui est quasiment incontrôlable. Cette inquiétude est pour la majorité du temps disproportionnée face au « danger » qu’il y a en face. Lorsqu’une personne fait une crise d’angoisse (ou attaque de panique) il peut y avoir un sentiment de terreur, d’effroi. On peut avoir peur de soi-même tellement cela devient incontrôlable. Beaucoup me disent qu’ils ont l’impression ou la peur de devenir « fou ». Cela occupe presque totalement les pensées.
Dans le langage commun, on décrit souvent les personnes anxieuses comme des personnes qui se font constamment du mauvais sang, des personnes qui se font des films. Cela me fait penser à un patient qui m’avait dit qu’il pourrait écrire plusieurs séries tellement il s’imaginait mille et un scénarios. Ces scénarios, peuvent être utilisés pour se préparer au pire. On peut comparer ça aux personnes qui en 2021 croyaient en la fin du monde et se sont mis à acheter des bunkers. Il y a eu une croyance (celle de la fin du monde) et pour cela, ils ont mis en place des stratégies pour survivre.
Vous l’aurez compris souffrir d’anxiété est éreintant. Cela est épuisant de toujours penser, ne pas avoir le cerveau en « pause ».Pour beaucoup, il est difficile de savourer les bons moments car il y aura toujours cette anxiété qui à tout moment peut appuyer sur le bouton « Alerte danger ».
Syndrome comportemental
Pour finir sur les syndromes, il y a le syndrome comportemental.
Ce syndrome décrit les comportements que l’on peut avoir lorsqu’on souffre d’anxiété, lorsqu’on fait ce qu’on appelle une crise d’angoisse. Le comportement d’un individu qui présente des angoisses est instable. Instable dans le sens où il peut tantôt être sidéré, en détresse tantôt être agité voire désorganisé. C’est une des caractéristiques cliniques. La fin d’une crise d’angoisse peut se traduire par une crise de pleurs, de colère.
Les crises d’angoisses
Les crises d’angoisses sont soudaines, il y a rarement un réel élément déclencheur. Aussi, ces crises peuvent se manifester chez des personnes non anxieuses.
La crise d’angoisse s’appelle aussi attaque de panique et lorsque l’on fait fréquemment ces attaques, on peut avoir un diagnostic de trouble de panique.
Les crises d’angoisses sont épuisantes de part tout ce que cela mobilise psychologiquement, physiquement et émotionnellement, mais aussi de la durée d’une crise. Ces crises peuvent durer quelques minutes mais aussi plusieurs heures.
Dans certains cas, il peut y avoir de graves complications comme un suicide, une fugue ou encore un épisode délirant aigu. On peut faire une attaque de panique et ne plus jamais en faire de sa vie ou au contraire que cela devienne fréquent. Lorsque cela devient fréquent, on peut retrouver chez beaucoup d’individus ce que j’appelle « l’angoisse de faire une crise d’angoisse ». C’est le serpent qui se mord la queue. Mais, cette angoisse est totalement légitime. Faire une attaque de panique n’a rien de plaisant, c’est inconfortable voire handicapant. Alors, on peut commencer à avoir peur que cela recommence et donc on angoisse d’angoisser. Suite à cela, plusieurs stratégies peuvent être mises en place pour éviter de refaire une crise. Comme par exemple, ne plus se rendre dans un lieu où l’on à fait une crise, ne plus regarder tel ou tel type de film, etc.
Il y a une grande différence entre une personne qui souffre d’un trouble de panique et qui vit des crises d’angoisses de manière récurrente et une personne qui a un tempérament anxieux. Le tempérament anxieux est handicapant mais pas de la même façon. Celui-ci va plutôt se traduire par une angoisse permanente, flottante, avec un gros sentiment d’insécurité permanente.
Quoi qu’il arrive, si vous ressentez un mal-être ou une forte anxiété, n’hésitez pas à contacter votre médecin traitant qui saura vous écouter, vous conseiller et vous orienter potentiellement vers un spécialiste de la santé mentale comme un psychologue ou un psychiatre.
En cas d’urgence, vous pouvez également appeler le 3114 qui est le numéro national de prévention du suicide. Des professionnels qualifiés (infirmier.e.s, psychologues sous la supervision d’un médecin) sont à votre écoute et vous aideront en cas de détresse ou de demande d’informations. Il est important de préciser que vous pouvez appeler ce numéro 24/24 et 7j/7. Ce service est gratuit et la confidentialité des appels est assurée.